Saviez-vous que le département de l’Allier compte plus de 560 châteaux recensés ? Un chiffre impressionnant, qui fait de cette terre un paradis pour les amateurs d’histoire, d’architecture et de mystère. Bien au-delà des grandes figures royales, le Bourbonnais — ancienne province puissante et berceau de la dynastie des Bourbons — a vu s’élever, siècle après siècle, des centaines de demeures seigneuriales, forteresses, manoirs et donjons.
Le territoire Entr’Allier Besbre et Loire en abrite une part précieuse. Des châteaux habités, restaurés, parfois en ruines ou oubliés, mais toujours porteurs d’émotion. Certains, nimbés de légendes, semblent encore murmurer les récits du passé…
À Saint-Pourçain-sur-Besbre, le château de Beauvoir domine avec grâce la vallée de la Besbre, depuis un promontoire qui lui offre une vue dégagée sur les prairies alentour. Ancienne maison forte dont l’origine remonte au XIIᵉ siècle, le château a été remanié à plusieurs reprises au fil des siècles, jusqu’à devenir la demeure harmonieuse que l’on découvre aujourd’hui.
Entouré de douves sèches et orné d’un jardin à la française parfaitement dessiné, il impressionne par l’équilibre de ses lignes et la sérénité qui s’en dégage. La visite libre de ses extérieurs permet de profiter pleinement de son architecture et de son parc soigneusement entretenu. Un lieu qui conjugue patrimoine et art de vivre, notamment à travers sa superbe orangerie, souvent choisie comme salle de mariage pour son charme raffiné et son cadre bucolique.
À quelques encablures de là, toujours sur la commune de Saint-Pourçain-sur-Besbre, se niche le château de Thoury, joyau féodal méconnu. Édifié entre les XIIe, XVe et XVIe siècles, il déploie une enceinte en forme de pentagone irrégulier, flanquée de cinq tours d’angles variées. L’ensemble est d’une rare intégrité : chemins de ronde et murailles sont restés intacts, formant une véritable capsule médiévale au cœur de la campagne.
Les deux corps de logis, reliés par de hautes courtines, et la porte principale rehaussée de mâchicoulis, encadrée de tours en poivrière, composent un décor aussi imposant qu’élégant. Le parc du château est en accès libre d’avril à octobre, offrant une approche paisible et sensible de ce patrimoine d’exception, au cœur du Bourbonnais rural.
Le château de Saint-Géran, à Saint-Gérand-de-Vaux, abrite l’une des légendes les plus célèbres du Bourbonnais, une histoire qui mêle trahison, mensonge et justice retrouvée. Elle débute au XVIIᵉ siècle, dans les hautes sphères de la noblesse.
La marquise de Saint-Géran, après plusieurs années de mariage sans enfant, tombe enfin enceinte. Mais cette grossesse fait naître des tensions au sein de l’entourage familial. Certains, redoutant l’arrivée d’un héritier légitime qui viendrait bouleverser les successions et les ambitions personnelles, fomentent un complot.
Lorsqu’elle accouche, dans le secret et sans témoin, une servante lui annonce froidement que son bébé est mort-né. En réalité, l’enfant est vivant : il est confié en cachette à une nourrice et élevé loin du château, dans l’anonymat le plus total.
La marquise, brisée, ne cesse de douter. Les années passent, les murmures grandissent. Un jour, un jeune homme se présente, affirmant être l’enfant volé du château. Une bataille judiciaire longue et spectaculaire s’ouvre, rassemblant témoins, domestiques, notables et juges. Après bien des rebondissements, la justice reconnaît l’enfant comme le véritable héritier des Saint-Géran.
Ce fait divers inspira plusieurs écrivains, dont Voltaire et Mme de Genlis, et reste l’un des plus grands récits d’enlèvement d’enfant de l’époque moderne. Aujourd’hui encore, les habitants du territoire aiment raconter l’histoire de cet enfant né dans l’ombre, mais revenu à la lumière.
Le château, toujours propriété privée, ne se visite pas, mais il est visible depuis la route, tel un gardien silencieux de cette tragédie humaine qui marqua toute une époque.
Du haut de sa butte calcaire, la forteresse de Montaigu-le-Blin semble veiller, fière et silencieuse, sur les collines bourbonnaises. Elle se dresse au cœur d’un territoire aux paysages ondoyants : la Forterre. Cette zone de plateaux argilo-calcaires, ponctuée de buttes appelées localement « tureaux », est sillonnée de cours d’eau sinueux qui descendent doucement vers l’Allier. La Forterre, dont le nom vient des « terres fortes » — limons fertiles déposés sur le calcaire tertiaire — est réputée pour la richesse de ses sols, parmi les meilleurs du département après ceux de la Limagne.
C’est sur l’un de ces reliefs que fut bâtie, au début du XIIIᵉ siècle, la forteresse de Montaigu-le-Blin. On y découvre un noyau castral massif, ceinturé d’une enceinte circulaire flanquée de neuf tours, certaines ruinées, d’autres toujours debout, bravement tournées vers l’horizon.
Au XVe siècle, la puissante famille de Chabannes y établit sa demeure, ajoutant un logis seigneurial et réaménageant l’intérieur sans lui ôter son caractère défensif. À travers ses pierres, on devine les intrigues, les repas fastueux et le martèlement des sabots dans la cour.
Classée Monument Historique depuis 1926, la forteresse se visite de juin à septembre. Depuis ses remparts, la vue embrasse un paysage de vallées larges et pentes douces, qui donne tout son sens au mot « Forterre ». Ici, la nature et l’histoire s’unissent en un même souffle, majestueux et tranquille.
À Montoldre, le paisible château de Gayette, aujourd’hui devenu un EHPAD, porte en lui une légende à la fois tragique et troublante, transmise depuis des générations : celle de la pie voleuse.
L’histoire se déroule au XVIIᵉ siècle. Des ustensiles en argent disparaissent mystérieusement : cuillères, fourchettes, objets précieux. Très vite, les soupçons se tournent vers une jeune servante, accusée sans preuve. Un jugement expéditif l’envoie en prison à Moulins, où elle meurt après quinze années d’enfermement, clamant toujours son innocence.
Bien plus tard, alors que des peupliers sont abattus sur le domaine, les bûcherons découvrent, dans le tronc creux d’un arbre, l’argenterie volée. L’auteur des larcins n’était autre qu’une pie chapardeuse, qui, attirée par les reflets du métal, avait méthodiquement constitué sa cachette.
Accablés de remords, les seigneurs, dans un geste de repentance, font don du château aux Frères de la Charité, qui y établiront un hôpital pour les plus pauvres. La mémoire de la servante injustement condamnée trouve ainsi une forme de justice tardive.
Et aujourd’hui encore, le donjon de Gayette se dresse fièrement au centre du domaine, comme un gardien silencieux d’un passé à la fois douloureux et romanesque. René Fallet, écrivain bourbonnais ayant vécu à Jaligny-sur-Besbre, évoque ce donjon localement surnommé « Galette » dans son roman Le Vieux de la vieille, lui offrant une place discrète mais réelle dans la littérature régionale.
L’Office de Tourisme Entr’Allier Besbre et Loire vous propose :